Année 133 - Septembre 2021En savoir plus
Le Christianisme n’existe pas... encore!
abbé Livio Tonello, directeur
Pour la réflexion de ce mois, je m’inspire d’un livre du théologien français Dominique Collin dont le titre provocateur est peut-être un peu paradoxal. La résurrection est au centre de la vie chrétienne et la Pentecôte marque le point de départ de l’évangélisation. Mais les chrétiens sont-ils encore fidèles à l’Évangile ? Peut-on affirmer qu’aujourd’hui l’Évangile est vraiment vécu par ceux qui se disent chrétiens ?
Un « christianisme du dimanche » n’est pas conforme à l’Évangile du Royaume annoncé par Jésus. Sa résurrection, que nous célébrons chaque dimanche pendant la Sainte Messe, est-elle vraiment source de vie et d’espoir ? Pendant la pandémie, nous nous sommes sentis comme perdus et le confinement nous a privés de la Messe du dimanche et des contacts sociaux. Depuis longtemps et dans de nombreux pays européens, nous assistons à l’affaiblissement des traditions et des signes chrétiens. Les chrétiens d’Occident sont-ils une espèce en voie de disparition ?
Le Ressuscité est-ce un personnage qui ne dit plus rien ? Paradoxalement la lente déchristianisation est une opportunité à condition que les chrétiens sachent retrouver le véritable et étonnant message de l’Évangile : accueillir la force de l’appel du Royaume de Dieu. On ne peut comprendre vraiment l’Évangile qu’à travers le témoignage personnel où l’Évangile devient la lumière de la vie en passant d’un christianisme d’appartenance à un christianisme d’expérience.
Dans le christianisme d’appartenance, qui est une institution à laquelle on adhère, il est possible de se dire chrétiens sans une identité profonde et sans croire et sans vivre vraiment la foi ; en revanche dans le christianisme d’expérience, on vit une expérience relationnelle avec le Seigneur et une profonde rencontre avec le Royaume de Dieu qui nous invite toujours au risque de la foi. Le christianisme n’est pas « déjà fait ».
Nous devons toujours l’inventer à nouveau en le pensant et en vivant son « a-venir » à la présence du Christ. La vocation du chrétien n’est pas celle de considérer l’Évangile comme « une œuvre d’art ancienne » mais de l’inventer à nouveau comme la parole capable de parler aux hommes et aux femmes d’aujourd’hui. Le christianisme n’existe pas encore car aucune personne, aucun système de pensée, aucune église ne peuvent se dire chrétiens sans reconnaître qu’ils doivent encore le devenir pleinement.
Le christianisme n’existe pas encore parce que ce qui le rendra possible dépend de nous avec la conscience d’être invités à accueillir un don dont nous ne sommes pas les maîtres. Le christianisme n’existe pas encore car il n’est pas « déjà arrivé » car c’est un événement qui se déploie dans l’histoire humaine en ouvrant des possibilités nouvelles.
Avec l’événement de Pâques naissent la nouveauté et la force qui nous permettent d’accueillir le message de Jésus, la voie, la vérité et l’envie, de le réaliser. Donc c’est à nous de faire exister le christianisme.