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Scruter le futur

abbé Livio Tonello, directeur

En juillet de l’année dernière nous avons rappelé que cinquante ans se sont écoulés depuis le premier débarquement de l’homme sur la lune (21 juillet 1969). J’avais cinq ans et je ne pouvais pas comprendre l’importance de cet exploit. Je me souviens aussi que les adultes utilisaient une expression populaire pour nous inviter à nous méfier de ceux qui promettaient «la lune dans le puits».

Je savais que cela était impossible car la lune est dans le ciel, je pouvais la voir se refléter dans l’eau sombre et profonde, à portée de main et pourtant inatteignable. Que d’enseignements dans cette métaphore! Regarder la lune nous oblige à lever les yeux et à ouvrir notre horizon visuel. Que c’est beau de contempler notre satellite lumineux dans les limpides nuits étoilées! La lune suffit à éclairer le chemin sans avoir besoin de lumières artificielles.

Mais combien d’allusions aux problèmes de notre époque: des charmeurs et des aguicheurs promettent l’impossible pour obtenir un consensus. Et on continue à tomber dans le piège, comme le loup de la fable qui en écoutant le renard est tombé dans le panneau du reflet de la lune dans le puits pris pour un fromage. Les idées sont bonnes, nous nous nourrissons de rêves qui peuvent être dangereux s’ils sont trop éloignés de la réalité.

Parfois nous regardons dans le puits sans être capables de viser haut: nous sommes fascinés par ce qui semble à portée de main et dont nous ne voyons que le reflet. On peut réaliser des rêves et des désirs aussi en regardant en bas. Nous pouvons poursuivre de grands projets aussi dans la réalité de la vie quotidienne. La politique du grain sénevé, du grain de blé, du levain est bien loin des performances politiques et militaires mais elle est efficace et possible.

Elle représente la charité discrète de nombreux bienfaiteurs, la prière silencieuse et cachée des ermites, notre dévotion confiante. Elle est aussi ce qui est en haut et qu’on ne peut pas atteindre. Face aux nombreuses nécessités de la vie quotidienne, il serait bien commode d’avoir un «puits des désirs»: un lieu où jeter nos attentes et où puiser de l’espoir. Mais dans le puits, on ne voit que le reflet de ce qui est en haut et qui nous invite à tourner les yeux vers Celui qui nous regarde déjà. Jésus n’a jamais promis l’impossible même avec ses miracles.

La foi ne nous assure pas la solution des problèmes mais elle nous demander de lever les yeux pour voir le reflet de la tendre attention de notre Père. C’est bien ce que le Pape François a voulu nous montrer les mois derniers quand, en pleine pandémie sur la Place saint Pierre complètement vide, il a invité chaque chrétien à prier. L’homme est allé sur la lune et, une fois surmontée cette période difficile, il ira encore plus loin dans les années à venir. Ce sont de grandes entreprises possibles si on compte sur les ressources de notre planète.

L’ immensément grand et l’infiniment petit autour de nous sont un don fascinant et mystérieux. Ne nous faisons pas d’illusions en pensant pouvoir tout connaître et savoir dévoiler tous les mystères. Nous avons la possibilité d’utiliser le potentiel de la création pour améliorer la vie humaine. Nous ne pouvons pas permettre que la richesse accumulée par quelques-uns agrandisse le fossé entre les riches et les pauvres en augmentant l’exploitation et l’appauvrissement. Ce qui est à portée de main pourrait ne plus être disponible demain.

Et cette lune, qui se reflète dans le puits qui semble si proche, pourrait devenir une chimère si le désir naïf de la saisir nous faisait tomber dedans.