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Une religion « faite maison »

abbé Livio Tonello, directeur

Pendant de longs mois, nous avons redécouvert une dimension importante de la foi. Une foi vécue chez-soi puisque l’on n’avait pas accès aux églises de nos communautés. On pourrait l’appeler un temps de grâce, même s’il a été marqué par une grande souffrance car, malgré tout, nous avons pu garder une vie de foi et de prière sans nous rendre à la Messe du dimanche au sein de notre communauté.

Les « célébrations domestiques » ont éclairé plusieurs aspects de notre identité chrétienne en soulignant la signification du « sacerdoce commun ». Il ne concerne pas seulement les rites et le culte mais il explicite le « sacerdoce de la vie ». Cela a été un exercice de liberté et de responsabilité en transformant toute notre vie et chaque jour en une offrande. Dans la tradition juive, la maison est un espace privilégié pour grandir à la lumière de la foi, où témoigner et célébrer la mémoire du salut que Dieu nous a donné.

La maison est le lieu où l’on vit et où l’on célèbre l’œuvre de libération accomplie par Yahweh. Jésus n’a pas accompli sa mission seulement dans les rues, dans les synagogues ou dans le temple mais aussi dans les maisons. L’Évangile entre dans l’histoire en partant des maisons : la maison de Nazareth où Jésus a grandi ; les maisons où il est accueilli amicalement et où il partage la parole (Marthe, Marie, Zachée) ; les maisons où il a accompli des guérisons ; les maisons comme lieux des banquets : la Cène avec les disciples aura lieu aussi dans une maison.

Dans les premières communautés chrétiennes, la maison était l’espace de l’Esprit Saint, un lieu de prière et d’évangélisation comme le décrit le livre des Actes des Apôtres. Le culte se déroulait dans des lieux aménagés dans des maisons privées, comme celles d’Aquila et Priscille, de Nymphas à Laodicée, de Lydia à Philippis, de Chloé et Stéphanas. Ces maisons ne sont pas seulement des lieux de rencontre mais elles accueillent toute la famille qui inclut toute la parenté, les esclaves, les salariés et parfois les associés et les collaborateurs.

Aujourd’hui, pour nous, la maison est d’abord le lieu des affections et des relations familiales (la maison natale), le lieu où notre identité se forme et où nous sommes éduqués à la vie. Sans l’idéaliser, elle peut être aussi un lieu de conflits parfois graves qui s’associent à des violences psychologiques et physiques. Cependant, la maison est très importante pour nous, elle représente un point de repère pour notre vie, un lieu où l’on grandit et où l’on apprend à se connaître soi-même. Ainsi l’expérience de faire de nos maisons un lieu de célébration où la voix de Dieu résonne a-t-elle été un grand don à garder aussi après la fin de la pandémie.

La nécessité nous a rendus conscients du fait que, comme pour Jésus, pour les chrétiens aussi, il n’y a pas de lieux sacrés ou profanes, d’actions sacrées ou d’actions profanes, de personnes consacrées ou non consacrées. Tout est à la présence de la sainteté de l’amour de Dieu. Ainsi des paroles nouvelles jailliront de la prière quotidienne, comme on le souhaite surtout durant cette période de Pâques. Des paroles nouvelles pour exprimer notre fatigue, notre espoir, nos désirs, pour invoquer le regard bénissant de Dieu et pour sentir sa proximité.